samedi 29 novembre 2014

Le réveil du coeur




Le réveil du coeur de François d'Epenoux aux éditions Anne Carrière


 Jean travaille dans la publicité. Il vit depuis quelques temps avec Leïla, jeune femme d'origine marocaine, qu'il n'a jamais osé présenter à son père. Il faut dire que son père est un personnage. Le caractère bien trempé, il se refuse au monde actuel, il vit dans ses souvenirs des années 50-60, pourfend la société contemporaine avec véhémence.


    Dans la première partie du roman, c'est Jean qui nous prend à témoin de ses relations, avec celui qu'il appelle "le Vieux". Il nous raconte ses discussions avec lui, le jour où il lui a annoncé contraint et forcé qu'il vivait avec Leïla. En effet Leïla est  enceinte, "le Vieux" va devenir grand-père et il  ne voit pas cette naissance d'un très bon oeil.

    "-Jean, vous n'allez pas faire ça?
      - Mais quoi?
      - Mais enfin, mettre un enfant au monde, je veux dire dans ce monde là?
      - Comment ça, dans de monde là?
     Il vide son verre d'un trait et craque littéralement.
       -Comment ça, "comment ça?"... enfin tu as des yeux pour voir , quand même, non? On a tout sali, Jean! Tout ! On fout en l'air les gens, les animaux, la nature, c'est plus fort que nous. On est incapables de donner à bouffer à tout le monde, incapables de préserver la beauté des choses, c'est comme ça! C'est dans nos gènes! Et pourtant on a encore rien vu, tu sais aussi bien que moi ce qui se prépare, non?! La montée des eaux, les terres englouties, les exodes de masse, ce n'est pas moi qui l'invente! ... Ça a commencé! Tous les scientifiques annoncent la chienlit! Et c'est là-dedans que tu veux balancer ton gosse?"

    Malo finit par naître, le grand-père est invité mais se fait tirer l'oreille pour venir le voir. Le Vieux est finalement ému devant son petit-fils. Le couple Jean-Leïla  va mal la séparation arrive, Malo grandit! Le grand-père dont les relations sont houleuses avec sa belle-fille, devient persona non grata dans la vie de son petit-fils. Le couple finit par se séparer.


    Dans la deuxième partie du roman c'est au tour du Vieux de nous raconter les événements. Jean et Leïla, très occupés pendant les vacances, doivent trouver quelqu'un pour garder Malo. N'ayant pas de solutions Leïla accepte que Jean appelle le Vieux, pour lui demander de s'occuper de Malo pendant le mois d'août. Le Vieux est très remonté car il n'a pas vu Malo depuis longtemps, sa bru lui refusant le contact avec son petit fils. Le vieux finalement accepte de s'occuper de son petit-fils, rouspétant pour la forme. Une rencontre, un séjour qui va bouleverser leur vie à tous les deux. Ils vont se conquérir l'un l'autre. Le Vieux, laissant sa carapace se fissurer au contact de son petit-fils.

   Le réveil du coeur, est un roman touchant.  Un roman mêlant tendresse et regard acéré sur notre monde actuel.  Un roman qui, malgré une intrigue cousue de fil blanc, nous prend et ne nous lâche plus. Une belle alchimie entre moments de tendresses et réflexions désabusées sur notre société.  Un roman qui nous montre comment l'innocence de l'enfance va venir saper les défenses d'un vieux ronchon au grand coeur, muré dans la gangue protectrice de la nostalgie. Le plume de François d'Epenoux est tour à tour  douce, poétique,  mordante et drôle. Un très bon moment de lecture.


   "Avec la naissance de son fils, un père accouche souvent de lui-même. Si un seul voit le jours, les deux voient la lumière."

dimanche 23 novembre 2014

Le cimetière des hirondelles



Le cimetière des hirondelles de Mallock aux éditions Fleuve Noir


   Le commissaire Mallock et son équipe sont soumis à rude épreuve. Le frère de Julie, l'une des plus proche collaboratrices du commissaire, l'un des cinq doigts de sa main, a été arrêté en République Dominicaine. Manu, cet homme bon, historien, mari exemplaire et jeune père, a quitté le domicile familial après le visionnage d'un documentaire, a pris un vol pour la République Dominicaine et a tué un homme. Quelle est l'explication de ce geste insensé pour un homme aussi équilibré.


   Dès qu'il est mis au courant de cette étrange histoire, Mallock prend la direction de la République Dominicaine pour récupérer Manu dont le transfèrement a été négocié entre les deux États. Manu ayant été grièvement blessé lors de l'assassinat de Darbier, Mallock ne peut l'interroger tout de suite. Le commissaire commence donc son enquête. La culpabilité de Manu ne fait aucun doute. Quand Manu est enfin apte à être interrogé, Mallock est anéanti. Manu serait-il devenu fou. Il affirme avoir tué Darbier car celui-ci l'avait déjà tué dans le passé. Mallock ne sait pas par quel bout prendre cette affaire, faute d'idée il se rend chez une voyante du cru qui lui fait ingurgiter une potion qui lui fait voir des images effrayantes.


   De retour à Paris, l'enquête s'oriente vers la piste insolite de la réincarnation. Manu, interrogé, répond par la voix d'un lieutenant décédé pendant la première guerre mondiale, suite aux tortures d'un ogre nazi. Mallock va donc enquêter sur la vie de ce lieutenant pour vérifier le témoignage de Manu. Tout concorde. Mais comment innocenter Manu? Comment faire avaler à la justice cette théorie de la réincarnation?  Mais cette piste est-elle la bonne? Réincarnation ou manipulation?


   Dans ce roman passionnant et merveilleusement écrit nous suivons les doutes, les interrogations de Mallock,  misanthrope au grand coeur, un homme pétri de douleur (il a perdu sa femme et son fils) et d'humanité. Un ours au coeur tendre terriblement attachant.

   "Mais qu'est-ce-que c'est que cette société de merde, se mit à grogner Mallock, où l'on ne pouvait plus rouler, manger, fumer ou travailler tant qu'on peut, et dire toutes les vérités qu'on veut, les mots qui nous viennent? C'était  quoi ce putain de purgatoire, où les Hommes, nivelés par le bas, ne vivaient plus qu'émasculés, assistés, assurés , botoxés, lobotomisés, loto-misés, liposucés, flashés? Putain de vie molle, où on allait, queue baissée, autocensurés, à petits pas comptés, chercher ses recommandés ou les résultats dûment remboursés de sa coloscopie."


   Une enquête passionnante du début à la fin. Un récit émaillé de réflexions sur notre société, servi par une plume à la fois acérée, tendre, humoristique, poétique. Un excellent moment de lecture, à mettre entre toutes les mains.

   "Dans les couloirs et les salles d'attente du bâtiment public croupissait la foule des petites gens. Ils attendaient en guenilles, le regard brillant d'espoir naïf une justice en loques, une salope au yeux bandés qui ne montait qu'avec ceux  qui pourraient s'en payer les charmes."

lundi 17 novembre 2014

Lettres à l'Errant



Lettres à l'Errant de Marie-Hélène Sainton aux éditions Le Serpolet




  Lettres à l'Errant est un recueil de lettres écrites mais jamais envoyées, des lettres d'amour à l'Errant, cet homme de silence, il est pantomime, dont l'auteure des missives est tombée amoureuse. Un amour tardif qui va lui faire quitter son foyer alors que l'objet de sa passion est toujours en couple.
La belle va tout faire pour apprivoiser l'être qu'elle aime, elle va apprendre à le connaître au fil des rencontres.

   "Quand on aime quelqu'un, on a envie d'apprendre sa langue. Je tente d'apprendre la vôtre. C'est à dire vos silences. Soyez indulgent pour mes erreurs de syntaxe."


Cet homme qu'elle aime et qui l'aime à sa façon, d'une manière presque désincarnée, platonique, l'a révélée à elle-même, elle semble ne vouloir continuer à vivre que par lui, que pour lui.


  "J'ai existé à partir de lui. De ce regard qui ne livrait rien de lui, mais qui m'a tout livré de moi-même, m'a tirée de ma grisaille, de ma léthargie.
    Rien. Vous n'avez rien fait pour cela. Juste un regard sur moi et sa magie."


  Avec Lettres à l'Errant, Marie-Hélène Sainton signe un superbe roman épistolaire, plein d'un amour magnifié par le fait qu'il reste platonique. Les lettres sont pleines de sensibilité, de pudeur, mais aussi d'audace. Un recueil  servi par une plume poétique, exigeante, émouvante et à la fois pleine d'humour. Un véritable régal de lecture.

   "Et je me tais. Moi aussi.
     Une partie de vous est déposée en moi. Je la caresse et la nourris. Quand je vous ouvrirai, vous ne serez pas dépaysé. Vous la réintégrerez.
      Vous direz : "C'est drôle comme je me reconnais en elle.
       Moi je me tairai.
       Je suis moi et vous.
      Je vous ouvre. Ouvrez moi."

   Ce livre a été récompensé par le prix Paul Bellat en 2010












 


 

samedi 15 novembre 2014

Jim



Jim de Harold Cobert aux éditions Plon collection Miroir


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  Jim Morrison, le charismatique, et emblématique chanteur des Doors, est à Paris. Nous sommes en mars 1971. Il est venu rejoindre Pam, sa compagne de toujours, celle avec qui il entretient une relation houleuse, faite de séparations et de réconciliations. C'est un homme au bout du rouleau qui nous raconte son histoire. L'histoire d'un poète phagocyté par le Roi Lézard. Un homme qui veut être considéré, reconnu pour sa poésie, et qui s'est enfermé lui-même dans son personnage de rocker sulfureux. Il veut se débarrasser de son image de chanteur.


   "Heureusement, je suis gras et laid maintenant. Tu le vois bien, tout le monde le voit. J'aime cette laideur, elle me protège et me révèle en m'éclipsant, elle force les autres à regarder avec douceur à l'intérieur de moi et non plus à s'arrêter de manière abrupte au masque du chanteur gueulard et provocateur."


   Jim Morrison a vécu à l'âge de quatre ans une expérience qui l'a marqué à vie. Alors qu'il était en voiture avec ses parents ils ont assisté à l'accident d'un camion transportant des indiens et Jim a senti l'esprit de quelques uns de ces indiens intégrer son propre corps. Cette expérience va influencer la plume du jeune poète, l'orienter vers un mysticisme teinté de chamanisme. C'est pour atteindre cet état de conscience modifié que Jim va se mettre à boire de plus en plus et à essayer tout type de drogues. C'est dans cet esprit chamanique que va être crée le groupe des Doors, pour ouvrir les portes de la perception. Mais très vite Jim se sent étouffé par l'image qu'il donne de lui sur scène, il regrette les premiers moments du groupe, ce groupe qui devient de plus en plus tenté par le profit. Jim lui refuse cela et des tensions apparaissent dans le groupe.


   "Je peux comprendre que les autres aient cédé aux sirènes du cauchemardesque rêve américain. Rares sont ceux qui y résistent. La petite maison avec la pelouse bien tondue, la femme et les enfants bien propres sur eux, le frigo, la télé, les céréales, la cuisine équipée, le balcon, le four, les briques de lait, le garage, payer gentiment ses impôts, faire de la musique comme on va travailler à la poste, tout ça pour posséder des trucs qui finissent par te posséder, devenir ce que l'on a, avoir plutôt qu'être, accumuler et ériger ainsi son propre mausolée pour préparer son entrée dans la mort. Et mourir vivant, enseveli sou la chose formatée qu'on est devenu, formatée pour entrer dans la petite boîte finale et définitive. La fin, le vraie."


  Dans ce roman Harold Cobert endosse avec brio le costume de Jim Morrison. En mêlant habilement les citations du poète (répertoriées à la fin du livre) à ses propres mots, c''est Jim Morrison lui-même qui semble nous parler à  travers les mots de l'auteur. Un exercice de style passionnant particulièrement bien réussi. Harold Cobert a su ressusciter cette étoile filante, ce poète prisonnier de son image de rock star et de ses excès. Une réussite!

mardi 11 novembre 2014

L'écrivain national de Serge Joncour une chronique de Leeloo de leeloosenlivre.blogspot.fr



Aujourd'hui Les lectures du hibou ouvrent leurs portes à Leeloo qui vient de créer son blog : leeloosenlivre.blogspot.fr. Je vous invite amicalement à suivre ce blog. Leeloo chroniquait ses lectures sur sa page Facebook et ses chroniques m'ont tapé dans l'oeil. Maintenant qu'elle a franchi le pas, je lui souhaite la bienvenue dans la blogosphère et souhaite longue vie à son blog! Merci Leeloo pour tes chroniques avisées et percutantes.


L'ECRIVAIN NATIONAL - SERGE JONCOUR


Serge Joncour nous fait voyager dans deux mondes, celui de la naissance d’un livre et celui de l’amour. Mais également, dans la France profonde, dans les forêts du Morvan…
Serge ou l’écrivain national, car tel est le nom officiellement officieux dont l’affuble le maire de la petite bourgade où il est convié à résidence pour un mois. Dès son arrivée à la gare, Serge lit dans le journal la disparition d’un vieux retraité, Monsieur Commodore. Mais ce qui attire le plus son attention dans ce fait divers, c’est la photo de Dora et son ami Aurelik, deux marginaux d’origine étrangère. Surtout Dora ! 
La naissance de l’amour :
Souvent on dit que l’amour rend aveugle, je dirais qu’il rend bête ! Oui, très bête même, comment peut-on envisager une histoire d’amour avec quelqu’un qui ne peut nous mener nulle part qu’à notre propre perte ! Imaginez l’effet « ketchup » combiné à l’effet « boomerang » ! Serge tombe amoureux d’abord de Dora en photo, elle le hante, le subjugue, il fait tout pour la voir, l’avoir, quitte à se retrouver avec tout le village sur le dos. Il n’a pas su donner l’amour, il l’a déversé par flots, tout est arrivé d’un seul coup, c’est l’effet « ketchup »
Mais une marginale dont le conjoint est soupçonné de meurtre dans une France profonde, n’est pas quelqu’un de fréquentable. Les gendarmes le soupçonnent d’en savoir plus, les villageois, ses amis libraires lui tournent le dos. Cet amour se retourne contre lui, l’effet « boomerang »
« C’est une pure connerie de faire ça, une connerie de plus sans doute, mais qu’il est bon de retrouver le goût de l’autre, qu’il est fort de flotter dans l’éternel présent d’un début de rencontre, sans futur ni questions, qu’il y ait des lendemains ou pas, après tout qu’importe, un amour même impossible c’est déjà de l’amour, c’est déjà aimer, profondément aimer, quitte à en prolonger le vertige le plus longtemps possible »
La naissance d’un livre :
Serge, outre Dora, a une autre hantise, élucider le mystère de la disparition de Commodore, et pourquoi ne pas s’en inspirer pour le feuilleton qu’il doit écrire dans le journal local.
« tout destin est exceptionnel, mais une vie ne suffit pas à faire un livre, un livre c’est bien plus que ça, et bien moins tout en même temps »
Une réflexion sur le métier d’auteur, une plongée dans le cœur de l’humain et également dans les forêts du Morvan, une écriture fluide, un rythme soutenu et un humour très fin voilà les mots qui pourraient résumer ce Joncour !



dimanche 9 novembre 2014

Les ailes d'émeraude




Les ailes d'émeraude d'Alexiane De Lys aux éditions Nouvelles plumes



   Cassiopée O'Brien vit dans un orphelinat suite à un accident qui a causé la mort de sa mère. Après douze ans de vie dans cet institution, arrivée à l'âge de dix-huit ans, elle doit prendre sa vie en main et laisser derrière elle tous ses petits frères et soeurs de coeur dont elle s'occupait avec tendresse. Elle part donc affronter le monde seule. Elle gagne sa vie en faisant des petits boulots. Un jour alors qu'elle rentre au motel où elle loge elle se fait agresser par deux voyous. Refusant de se laisser détrousser sans se défendre, la jeune fille au caractère bien trempé et la langue bien pendue ne doit la vie qu'à l'intervention d'un jeune homme ténébreux dont le caractère l'exaspère au plus haut point. Petit à petit, elle va se rendre compte que le jeune homme la suit.


   Lors d'une de leur rencontres houleuses, le jeune homme en question , beau comme un dieu grec lui remet une enveloppe et lui offre un séjour dans un hôtel de grand luxe. Intriguée la jeune fille décide de profiter de l'aubaine. Mais quand elle ouvre l'enveloppe quelque-chose la pique et la rend très malade. A partir de ce moment là, Cassiopée constate des transformations dans son corps. Un jour elle se rend compte que quelque chose de bizarre lui a poussé dans le dos, elle casse cette sorte de cocon pour y découvrir deux ailes vert émeraude. Poursuivie par des hommes lourdement équipés et armées, elle va retrouver le jeune homme qui lui explique qu'elle a été recrutée pour ces capacités par le peuple des Myrmes. N'ayant rien d'intéressant à abandonner et très peu de perspectives d'avenir elle décide de suivre le jeune homme à la rencontre de son nouveau peuple, et à commencer son apprentissage qui va lui apporter de bien intéressantes capacités.



  Le genre fantasy n'est pas du tout ma tasse de thé mais quand j'a vu que l'auteur de ce pavé de sept cents pages était une jeune femme de dix-neuf ans, j'ai été intrigué et curieux et bien m'en a pris car  ce roman est passionnant. Malgré quelques maladresses de style, j'ai été impressionné par la maîtrise de l'intrigue, on est pris dès le début du roman et l'auteure ne nous lâche plus. Un livre plein de rebondissements, d'humour, des dialogues percutants , des personnages attachants. En bref un agréable moment de lecture dont j'attends la suite avec impatience.

lundi 3 novembre 2014

Monsieur mon Amour



Monsieur mon Amour d'Alexandra de Broca aux éditions Albin Michel


     10 Août 1792, à Paris, le peuple prend d'assaut les Tuileries, bien décidé à demander des comptes au couple royal, réfugié là depuis quelques temps. La révolution a un franchi cap supplémentaire, le roi jugé responsable de tous les maux subis par la France, doit répondre de ses actes. Louis XVI, Marie-Antoinette, leurs enfants et quelques fidèles serviteurs et proches  sont emmenés à la prison du Temple. Très vite on refuse au roi et à son épouse le droit de garder leurs serviteurs et amis, seule la famille royale va rester en captivité au Temple. L'entourage du couple est transféré à la prison de la Force en attente d'un jugement qui laisse peu de place au doute.


   Marie-Thérèse Princesse de Lamballe fait partie des proches de Marie-Antoinette, elle est l'amie de la reine et la Surintendante de sa maison. La Princesse, pour meubler le temps qui la sépare de son procès et de sa mort certaine, prend la plume, elle écrit à l'homme dont elle est amoureuse. Elle adresse ses lettres au Citoyen Philippe d'Orléans, cousin du roi, mais qui a fait siennes les idées révolutionnaire et est député du peuple. Elle y raconte son arrestation  se livre à lui,  lui laissant chaque jour, pendant les quinze jours que vont durer sa détention, un témoignage de sa vie, de son amitié avec Marie-Antoinette qu'elle défend bec et ongles contre les critiques dont on l'accable. Elle le supplie tout en restant très digne de lui venir, en aide, de la libérer. Elle termine chacune de ses lettres en appelant Philippe d'Orléans, son beau-frère, cet homme aux moeurs plus que légères dont elle est tombée amoureuse dès son arrivée en France pour se marier,  Monsieur mon Amour.

   " S'il en est ainsi, il me faudra m'humilier davantage pour obtenir ma liberté: vous êtes un chasseur de femmes et certaines des mes amies pleurent encore d'avoir été votre proie. Sauvez moi et je me donnerai à vous pour que vous puissiez accrocher ma chasteté à votre célèbre tableau de chasse. Le prix de ma libération sera le vôtre et s'il faut succomber pour sauver ma vie, je le ferai, mais sachez qu'aucun geste de vous, aucune bassesse, ne m'empêchera de vous aimer. Aujourd'hui, demain et jusqu'à mon dernier souffle."


   Dans ce roman épistolaire, Alexandra de Broca se met dans la peau de cette princesse turinoise, veuve à dix-neuf ans d'un descendant de bâtard de Louis XIV, un être pervers qui lui a fait subir les pires outrages. Elle nous montre un personnage attachant, une femme droite et fidèle en amour comme en amitié. Une femme de convictions, une femme éclairée qui malgré ses idées progressistes, restera fidèle jusqu'au bout à sa reine et aux enfants royaux. Un roman passionnant, poignant où il est question de fidélité, de courage, de justice. Une texte rendu intense par le choix fait par l'auteure d'imaginer cette relation épistolaire unilatérale entre la princesse et celui dont elle est amoureuse et qui pourrait lui venir en aide. Une belle réussite.

Roman à paraître le 6 novembre 2014






 

dimanche 2 novembre 2014

Le dernier secret de Versailles



Le dernier secret de Versailles de Jean-Michel Riou aux éditions Flammarion



  La construction du château de Versailles est terminée. C'est un château à la démesure du roi soleil dont la construction a duré des années, et qui est toujours en travaux d'aménagement, d'amélioration. Un château témoignage de la puissance de roi soleil, le roi bâtisseur, le roi guerrier. Un château immense, magnifique qui aura coûté beaucoup en argent et en vies humaines. Mais qu'est tout ceci comparé au désir de Louis XIV de laisser un témoignage de son règne, de son pouvoir absolu.

   "Versailles est son double, son jumeau. C'est une immense qualité pour un bâtisseur et un terrible handicap pour les autres : le roi veille à tout. C'est peut-être aussi ce qui explique la grandeur de son règne et la fascination qu'il exerce de la base au sommet. A quoi sert un roi? Lui a répondu en cherchant à accorder son rêve de Versailles à celui de son peuple. N'importe quel sujet peut voyager ici, explorer afin de ressentir la fierté d'appartenir à ce royaume car c'est aussi dans l'orgueil que se forme une nation."

  Nous sommes les témoins de la vie, du roi et de la cour, une vie rythmée par l'agenda du monarque qui varie rarement. "Avec un almanach et une montre on pouvait, à trois cents lieues d'ici, dire ce qu'il faisait." écrivait le Duc de Simon dans ses mémoires. La vie de cour nous est présentée dans toute sa vacuité, il faut paraître, se mettre en valeur, une vie occupée à suivre la quotidien du roi, à s'amuser, à comploter, une vie d'oisif.

   "Dans ce monde clos, la moquerie circule vite, de bouche en bouche, pour le plaisir de faire mal, dans l'espoir qu'en blessant le premier on s'évitera d'être touché, et  ce matin, la glose va bon train. Ainsi se nourrit l'oisiveté."

  Nous suivons le destin de Jean Le Faillon et de sa femme Amandine, héritiers de l'entreprise Pontgallet. Amandine, très belle femme qui aura le malheur de plaire au roi et déchaîner la jalousie de Madame Maintenon, son épouse. Amandine va suite à ces événements découvrir l'histoire de sa famille, une histoire qu'on lui a toujours cachée. Cette histoire est intimement liée Versailles, elle est la fille du Roi Noir, ancien roi de la truanderie qui avait mis la ville en coupe réglée et qui a disparu.


  Dans ce roman passionnant l'historie avec un grand H se mêle à l'histoire de ceux qui ont oeuvré à la construction de Versailles, on vit à la fois à la cour du roi et au milieu des architectes et des bâtisseurs. Deux monde bien distincts mais ou règne la même ambition, la même rouerie. Avec Le dernier secret de Versailles, Jean-Michel Riou signe le dernier volet de sa quadrilogie sur Versailles. Un roman rythmé qui peut se lire sans avoir lu les précédents, tant les retours en arrière sont présents. Un roman très documenté, ce qui ne gâche en rien l'intrigue au contraire.

Roman à paraître le 5 novembre